SCIC Rehab (81), un tiers de confiance au service des coopérations dans la rénovation énergétique

La lettre de l’impact positif vous propose cette semaine un focus sur une initiative dans le département du Tarn. À l’initiative du Pôle Territorial de l’Albigeois et des Bastides, les acteurs de la rénovation énergétique ont créé une Société Coopérative d’Intérêts Économiques (SCIC). On y retrouve aussi bien les collectivités que les entreprises et les habitants. Objectif : réfléchir ensemble et augmenter les coopérations. La SCIC propose un accompagnement aux habitants. Du simple diagnostic à l’analyse des devis jusqu’au suivi des travaux et les demandes d’aides. Un véritable tiers de confiance pour accélérer la rénovation énergétique sur le territoire. 

Nous vous proposons l’interview croisée de François Hamard, responsable technique et opérationnel de la SCIC Rehab et de Julien Frat directeur du Pôle Territorial de l’Albigeois et des Bastides.  

Découvrez en introduction notre reportage vidéo réalisé lors des Rencontres Nationales de l’Ingénierie Territoriale (RNIT) 2023 à Montpellier.

À quelles problématiques répondait la SCIC ?

La SCIC a été créée à la suite des opérations d’isolation à 1€ car les particuliers avaient un problème de confiance avec les artisans. Les différents intervenants de la rénovation énergétique ont été mis autour de la table. Ce sont les collectivités territoriales, les artisans, des particuliers mais aussi d’autres acteurs. Par exemple, les syndicats comme la Capeb ou des acteurs autour du solaire. Les élus avaient envie de travailler autour de la rénovation de l’habitat. Suite aux différents Plan Climat, nous avons identifié que l’habitant est un des premiers postes de consommation énergétique du territoire. Nous avons des constructions anciennes et peu performantes énergétiquement. 

Il fallait accélérer les actions déjà en cours ? 

Oui et il y avait l’idée de rendre accessible plus facilement les rénovations globales. Le constat que nous avons fait, c’est qu’il y a trop de rénovations par étape. Cela ne permet pas des rénovations performantes. Au niveau des particuliers, ce n’est pas simple. Pour une rénovation globale, il faut faire travailler plusieurs entreprises dont on ne connaît pas toujours les noms et les compétences. La SCIC devait agir comme un tiers de confiance pour faire du lien entre le projet des collectivités, les entreprises du territoire et les dispositifs d’aide existants. 

Quelle était l’idée du dispositif ? 

L’idée a été de réfléchir ensemble à ce qu’il faudrait pour pouvoir être plus efficaces. Aider la population et le territoire à travailler autour de la rénovation énergétique des bâtiments. C’était une initiative du Pôle Territorial de l’Albigeois et des Bastides. Ils avaient  un programme où ils proposaient des audits. Ils ont eu l’intuition qu’il fallait que cela sorte du champ purement public. Pour y arriver, il fallait aménager un programme qui non seulement fait des diagnostics, préconise des travaux, mais aussi accompagne les particuliers dans la réalisation de ces derniers. Nous pensions qu’en mettant tout le monde autour de la table, nous trouverions des solutions plus efficaces. Nous devions aussi discuter les uns avec les autres à partir de notre objectif commun : la rénovation énergétique des bâtiments.

Avec cette initiative, il y a désormais un acteur qui peut répondre à l’ensemble des demandes… 

Exactement. Nous pouvons, par exemple, assister les particuliers sur les aides. Il y en a beaucoup de différentes selon les cas, que l’on soit bailleur ou propriétaire occupant. C’est compliqué pour les gens de s’y retrouver ! Ce programme a donc d’abord été créé au niveau local ensuite repris par la Région pour, pour être étendu. Il se découpe en trois parties. Le département du Tarn, à travers son guichet unique, est en contact avec les habitants. Il nous les redirige s’il est pertinent de réaliser un audit énergétique. Celui-ci correspond à la deuxième étape. La troisième correspond à l’accompagnement de travaux où nous allons définir précisément le projet et vérifier les devis. Nous faisons cela pour que les travaux soient compatibles avec les préconisations mais aussi avec les demandes d’aide. Nous allons également assister le ménage dans les dépôts de demande d’aide. La SCIC est au service de tous les acteurs. 

C’est ce qui crée de la confiance pour les habitants ?

Notre accompagnement comprend aussi des visites de travaux pendant et après pour vérifier que les travaux soient bien faits. Cela sert à rassurer le particulier sur le fait que que tout se passe bien, que tout est normal et que s’il y a des problèmes nous pourrons les lever. La SCIC est un cadre qui favorise les échanges entre l’ensemble des membres, et donc notamment avec les habitants. Les coopérations sont favorisées et s’inscrivent dans de l’opérationnalité ce qui est très important ! 

C’est aussi une question de marketing pour bien montrer la présence d’un dispositif d’accompagnement… 

Oui. C’est aussi un réel argument pour les entreprises qui sont très engagées dans la SCIC. Quand il y a eu les isolations à un euro, les entreprises du territoire étaient très impactées par les grosses entreprises venant d’ailleurs. Elles avaient besoin de s’organiser pour avoir une certaine forme de reconnaissance. La SCIC est un objet concret et marketé sur lequel nous pouvons nous appuyer collectivement. 

Comment est financée cette initiative ? 

Nous sommes prestataires pour le Département du Tarn et pour la Région Occitanie. L’audit est financé par la région, avec un reste à charge de 90€ pour le particulier.

Quel est l’intérêt des collectivités de passer par une SCIC ? 

Les élus, au départ, avaient du mal à se projeter sur ce modèle. Quand ils ont compris que les entreprises et les particuliers avaient un intérêt à avoir cet opérateur pour amplifier leurs actions avaient un besoin d’un opérateur, cette entité a permis à tout le monde de s’y retrouver. Notamment dans la gouvernance et la manière de piloter notre objectif commun. Proposer un accompagnement, des entreprises le font. Accompagner une maîtrise d’ouvrage, des architectes le font. La SCIC est un opérateur économique à part entière qui permet d’éviter les problèmes concurrentiels pour permettre aux collectivités d’être présentes sur cette question de la rénovation. 

En quoi le format SCIC favorise vos activités ?

Le format SCIC, Société Coopérative d’Intérêt Collectif, permet d’avoir plusieurs types de sociétaires à l’intérieur de l’entreprise. Ces différentes entités discutent dans une assemblée générale mais il y a aussi un conseil consultatif. Ils échangent sur les problématiques afin d’orienter la stratégie de l’entreprise en fonction des différents intervenants. Nous échangeons à propos des problématiques des particuliers, des enjeux de la réglementation

qui évoluent… Mon Accompagnateur Renov a par exemple amené beaucoup d’évolution.  

Cette instance de dialogue permet-elle de mieux se connaître ? 

Oui puisque il y a des fédérations, des artisans, des particuliers, des collectivités… L’idée est d’œuvrer dans le sens de la rénovation. Cela permet de mieux se connaître et d’échanger ensemble. Ce qu’il est important de préciser, c’est qu’il y a une répartition des droits de vote. Elle permet de s’assurer que les artisans ne prendraient pas une part trop importante des décisions qui pourraient être à leur avantage et non à l’avantage de l’intérêt collectif qui est la rénovation énergétique.

Quel est le point commun de tous les acteurs qui participent à la SCIC ? 

Le point commun des acteurs, c’est la rénovation énergétique du bâtiment sur le

territoire du Tarn. Nous n’avons par exemple que des artisans tarnais. Nous nous limitons

aux artisans du territoire. Un des grands axes pour nous, c’est de faire comprendre aux particuliers qu’un artisan local sera toujours plus pertinent. Effectivement, il pourra intervenir plus rapidement en cas de problème, et il sera sûrement toujours là demain.

En terme d’impact, combien d’accompagnements avez vous effectué ces dernières années ?

Sur l’année 2022, nous avons réalisé à peu près 450 audits et une centaine d’accompagnement. Nous avons un impact économique de 3,5 millions d’euros de travaux. 

Nous ne comptons pas tous les audits où les habitants continuent les travaux avec leurs propres artisans… 

Quels retours avez-vous de la part des habitants ? 

Les habitants sont déjà rassurés par le fait que nous soyons prestataires d’un programme régional public. Le fait que nous soyons une société à but non lucratif et que nous ne soyons donc pas là pour orienter vers telle ou telle solution technique les rassure aussi. Nous avons également pas mal de particuliers qui viennent de la part d’artisans. Par exemple, un particulier peut venir voir un artisan en lui demandant de changer la chaudière. L’artisan peut voir que le logement mériterait d’abord d’être isolé… Nous intervenons avec une vision globale. 

Propos recueillis par Baptiste Gapenne