Tours Métropole Val de Loire : Artemis, un service public d’aide à la rénovation énergétique

Cette semaine la lettre de l’impact positif vous propose de découvrir une initiative réalisée à Tours : la plateforme « Artemis ». Depuis 2020, Tours Métropole Val de Loire a fait le choix de proposer un service public d’aide à la rénovation d’habitat. La plateforme Artemis est un guichet unique que les habitants peuvent solliciter lorsqu’ils réfléchissent à des travaux de rénovation énergétique. Des conseillers énergies les orientent et fournissent des analyses indépendantes sur les projets à mettre en place. Ils flèchent également les habitants vers les aides nationales et locales existantes. Objectif : favoriser la mobilisation des propriétaires occupants ou bailleurs et baisser l’empreinte carbone sur l’ensemble du territoire.

Aude Gobelet, vice-présidente chargée de la politique du logement et de l’habitat à Tours Métropole Val de Loire a répondu à nos questions.

À quelles problématiques la plateforme Artemis répondait-elle sur votre territoire ? 

Nous devons limiter les émissions de gaz à effet de serre. Nous savons que la consommation du secteur résidentiel est extrêmement importante. À Tours Métropole, c’est 35% de la consommation énergétique. Artemis est une réponse à cet enjeu. 

Il y a besoin d’inciter les habitants à agir ? 

En tant qu’acteur public, nous devons inciter mais aussi accompagner. En 2022, la rénovation énergétique est omniprésente dans le discours public. À l’époque, nous étions sur l’incitation à engager des travaux. C’est ce qui a motivé mon prédécesseur, Jean Luc Gaillot, qui a voulu créer cette plateforme.

Le principe était vraiment de dire à l’usager que la rénovation énergétique est faisable et que nous pouvons l’accompagner.

C’est vrai que les particuliers peuvent avoir peur de se lancer dans ce type de travaux. Comment les aider à passer le cap ?

Depuis 2020, je constate une évolution des mentalités. Les premiers appels concernaient des personnes avec une réflexion avancée sur la sensibilisation. Il y a trois éléments : l’amélioration du confort, la baisse de la facture énergétique et la possibilité pour le patrimoine de garder sa valeur dans le temps. Depuis 18 mois, nous avons aussi des appels évoquant une sensibilisation à l’environnement, à la nécessité de la décarbonation. La sensibilisation est là et les gens sont motivés. De nombreuses aides sont proposées. Beaucoup d’informations sont fournies par les médias, les professionnels du bâtiment ou les pouvoirs publics. C’est compliqué pour l’usager de s’y retrouver. Notre volonté actuelle est vraiment de dispenser un conseil non-commercial pour « guider l’usager de son souhait de rénover jusqu’à la réalisation des travaux »

Quelles ont été les étapes de mise en place ? 

Les premières réflexions ont commencé en 2019. La plateforme a été lancée début 2020. L’idée était d’internaliser des services qui étaient déjà en place. Nous avions des prestataires locaux. Le souhait de mon prédécesseur était d’en faire un service public, dispensé directement par la métropole. Le Covid a ralenti le lancement mais aujourd’hui les chiffres explosent en termes de fréquentation et d’appel sur la plate-forme. En 2020, nous avons eu 2664 actes de conseils. En 2022, nous sommes au double soit 4400. Nous avons mené un processus de concertation à partir du moment où la création a été décidée. Nous avons rencontré les prestataires pour leur expliquer. Les PTRE (Plateformes Territoriales de Rénovation Énergétiques) étaient une directive ministérielle. Cela a donc été très naturel. 

Qu’est-ce que cela change de passer à la notion de service public ?

Nous n’avons plus de prestataires ni d’intermédiaires aujourd’hui. Nous sommes responsables de la prestation. En fonctionnant en régie, nous maîtrisons parfaitement la « température du terrain ». Ce que je veux dire par là c’est que nous pouvons nous réorienter facilement. Aujourd’hui, nous avons les usagers en direct, nous voyons ce qu’ils nous disent. Nous pouvons tout de suite réorienter nos politiques publiques. Ce qui est aussi important, c’est que nous n’avons pas de service commercial. Nous avons cette valeur supplémentaire d’être coordinateur. Nous savons que l’un des écueils de la rénovation énergétique, c’est l’articulation entre tous ses acteurs. C’est important de pouvoir dire à nos usagers que la métropole intervient dans le quotidien de chacun. C’est un échelon de service public un peu méconnu par rapport à une mairie. Cela fait partie de la valorisation territoriale que l’on peut avoir. Nous travaillons aussi en lien avec les mairies car les habitants poussent plus facilement la porte de leur mairie. 

Qu’est-ce que la plateforme apporte à votre projet de territoire ? 

Nous souhaitons vraiment aller jusqu’à l’exécution des travaux. Travailler autour de l’impact carbone, c’est valoriser le territoire. Nous souhaitons être un territoire attractif. Demain, cela veut dire avoir des logements adaptés à la population qui souhaite s’installer. Des logements conformes et peu consommateurs d’énergie. Si un habitant raisonne en valorisation du patrimoine pour son bien, nous, nous raisonnons en termes de valorisation du territoire.. 

Comment fonctionne Artemis au quotidien ? 

Une dizaine d’agents composent Artémis. Avec un directeur de l’habitat privé qui dirige l’ensemble du service. Il y a aussi des conseillers énergie et une responsable de l’OPAH (Opération Programmée d’Amélioration de l’Habitat). Enfin, un autre point important : nous avons une personne dédiée à la copropriété. Il y a beaucoup de travail sur ce point spécifique. Nous proposons des réunions d’informations auprès de ces propriétaires.  Nous essayons aussi de travailler avec les syndicats de copropriété. Encore une fois c’est une mise en relation pour essayer d’informer et d’amener jusqu’à la réalisation des travaux. 

Quel est le schéma de fonctionnement ?

La première étape est l’accueil unique. Soit par un mail soit au téléphone. Un premier contact se fait avec un conseiller énergie. Il va demander si le logement est individuel ou collectif, rural ou urbain, etc. Il doit “cerner” la demande. Au regard de ce genre d’éléments soit le conseiller peut répondre directement aux interrogations, soit il propose un rendez-vous téléphonique plus long. Un rendez-vous physique peut également avoir lieu si nécessaire.Tout dépend de la quantité de travaux et de la complexité du logement. Une maison ancienne par rapport à un appartement un peu plus récent ne va pas être traitée de la même façon.

Après cette première analyse, que se passe-t-il ? 

Après les premières réflexions, si la personne veut s’orienter sur un certain type de travaux, les choses sont entre ses mains. Nous pouvons lui donner un annuaire de professionnels mais c’est lui qui doit prendre contact avec eux pour demander les devis. Artemis peut intervenir dans la phase suivante pour analyser les devis. C’est très intéressant car entre trois devis différents, ce ne sont pas les mêmes prestations qui sont proposées. Par exemple, pour l’isolation, certains matériaux sont plus intéressants que d’autres. Artemis peut aider dans ce genre de décision. Encore une fois, nous parlons là du regard technique. Sur le montant financier nous pouvons donner une idée approximative mais l’aspect commercial n’est pas ce qui nous préoccupe.

Le service permet-il également de flécher les aides ? 

Artemis et ses agents sont capables de décrypter les aides à la disposition des habitants. Ils vont demander un certain nombre de conditions et vont pouvoir orienter vers un certain nombre d’aides disponibles. Cette expertise est non négligeable.

Comment l’annuaire de professionnels est-il travaillé ? 

Ce sont les entreprises RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) . C’est impératif pour toucher les aides. L’écosystème des professionnels du bâtiment est un des points d’achoppement sur lesquels nous travaillons. J’ai déjà rencontré la Fédération Française du Bâtiment pour savoir comment nous pourrions travailler ensemble pour valoriser cette question de rénovation énergétique. Il faut que nous arrivions à voir comment simplifier la démarche pour l’usager. Nous ne donnons pas d’avis sur les professionnels. 

Quel coût le service a pour  la métropole ?

En termes de Ressources Humaines, c’est le coût des agents qui sont au sein du service. Nous avons aussi des aides directes de Tours Métropole Val de Loire pour accompagner la rénovation et l’adaptation. Ces aides montent à 6 millions d’euros. La métropole tenait vraiment à s’engager avec des aides directes. Nous les avions fléchés sur le programme local de l’habitat (PLH) sur 2018-2023. Les autres aides dispensées sont celles de l’ANAH puisque dans le cadre de l’OPAH, nous sommes devenus délégataires en ayant internalisé le service. Le montant des aides de l’ANAH s’élève à 10 millions d’euros sur les 6 ans. 

Quel impact avez-vous mesuré ? 

En 2020 le nombre de logements rénovés était de 454. Pour 2022, c’est 1719. Au niveau de la consolidation 2020-2022, nous sommes à 3804 logements rénovés. 10 339 actes de conseils ont été effectués pour 719 rendez-vous physiques. Artemis aura toute sa place car ce sujet de la rénovation énergétique public comme privée va être prégnant donc nous allons avoir de belles orientations à écrire dans le prochain PLH. Il faut que nous travaillions sur la réhabilitation performante. Aujourd’hui quelqu’un qui veut s’engager sur une rénovation énergétique doit avoir connaissance du bouquet de travaux importants à entreprendre pour qu’il puisse voir vraiment l’économie réalisée sur sa facture. Il faut réussir à faire comprendre à l’usager que changer uniquement ses fenêtres ne va pas réduire  à 100%sa facture. 

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Initiative repérée avec nos amis d’Intercommunalités de France. Vous pouvez retrouver leur étude Financer la transition écologique et énergétique en cliquant ici.