Le Pays Basque est l’une des zones les plus attractives de France. Une bonne nouvelle accompagnée de difficultés sur certaines politiques publiques comme le logement. Sous la pression des habitants locaux, les élus de la Communauté Pays Basque se sont saisis de cette question et mettent en place différentes actions. Au programme : la création du premier BRS (Bail Réel Solidaire) de France ainsi qu’un nouveau règlement pour lutter contre les meublés de tourisme.
Découvrez notre reportage vidéo ci-dessous.
Pour compléter, nous vous proposons de lire ci-dessous cet entretien accordé par Jean-René Etchegaray, le président de la Communauté d’agglomération Pays Basque.
Vous pouvez également retrouver l’interview d’Imed Robbana, directeur du COL (Comité ouvrier du logement) dont la structure a été pionnière dans l’utilisation du BRS en cliquant ici.
Pourquoi avoir choisi d’agir au niveau du logement sur votre territoire ?
La problématique du logement au Pays Basque est une question cruciale. Nous sommes une terre attractive. D’autres parties de la France le sont, mais nous le sommes particulièrement. Lorsque l’on compare la tension présente sur nos terres par rapport à ce qu’elle est sur d’autres parties du territoire, nous nous rendons finalement compte que la situation est plus grave qu’ailleurs. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous mobiliser à la Communauté d’agglomération pour avoir une politique active et volontariste.
Quel est le problème d’un trop-plein d’attractivité ?
Quand vous êtes attractif, il faut trouver des mécanismes de régulation. L’attractivité n’est pas le problème. Ce sont ses effets pervers. Que le Pays Basque soit attractif, car il y a un tourisme important, c’est bien ! Mais nous voyons que le prix de cession des terrains se fixe en fonction de l’offre et de la demande. Ils sont inaccessibles que ce soit pour la vente ou la location à la population du territoire. Cela fait débat. Nous estimons être sur la question du logement à un point crucial. Nous devons localement trouver des solutions. Notre pays est trop centraliste. Il faut faire de la différenciation. Nous n’avons pas, aujourd’hui, les moyens législatifs, juridiques et financiers pour lutter. Notre enjeu, c’est que notre population puisse continuer à vivre là où elle est née.
Comment a réagi la population ?
Le logement est un sujet sensible qui peut devenir très politique. Au Pays Basque, nous avons eu des périodes de tension dans les années 80. Notre territoire a été soumis à un certains nombres d’actes de violence et de terrorisme. Je fais partie de ceux qui, attaché à la République française, ne souhaite pas que l’on donne de prises à un certains nombres d’extrémismes. Ils existent encore, ils ne cherchent que l’occasion de venir porter leurs revendications.
Quel est le prix du m2 sur votre territoire ?
Le Pays Basque est très pluriel. Notre communauté d’agglomération regroupe 158 communes. Vous avez, à la fois, des communes de montagnes, mais aussi du littoral. La situation du prix de la construction n’est pas le même. On peut trouver des maisons à plus de 10 000 euros du mètre carré. Mais progressivement, les communes limitrophes sont aussi sous l’emprise de ce phénomène. Ce sont des signes inquiétants qui nous amènent à travailler sur tous les leviers.
Qu’avez-vous décidé pour agir ?
Nous avons pris des décisions réglementaires. L’idée est, par exemple, de réguler le marché des meublés de tourisme. C’est ce que nous faisons aussi actuellement pour parvenir à un encadrement des loyers. C’est ce que nous ferons auprès de nos parlementaires pour faire en sorte que la loi de finance puisse être modifiée afin de supprimer un certain nombre d’avantages fiscaux. Actuellement, un propriétaire de notre territoire a plus intérêt à louer à des touristes de passage qu’à des personnes ayant besoin toute l’année de vivre au Pays Basque.
Quels sont les leviers ?
La loi ELAN nous a donné des possibilités. Nous avons aussi décidé de mettre en place un règlement pour les changements d’usage pour les meublés de tourisme. Nous avons beaucoup de résidences secondaires. Parmi elles, il y en a beaucoup de louer de cette manière. La proportion augmente fortement. La loi permet d’imposer un règlement. Les plateformes ont pourtant essayé de faire tous les procès possibles. Mais nous avons réussi à faire valider notre règlement. Il permet de réguler le marché.
Retrouvez plus d’informations sur ce règlement en cliquant ici : https://www.communaute-paysbasque.fr/a-la-une-2/actualites/actualite/meubles-de-tourisme-un-nouveau-reglement-pour-favoriser-le-logement-a-lannee
L’intercommunalité, est-elle la bonne échelle pour travailler autour de cette question du logement ?
Je fais partie de ceux qui souhaitaient cette très large agglomération à l’échelle du Pays Basque français. Nous vérifions tous les jours que ce périmètre est pertinent pour embrasser les politiques publiques. Du logement à la mobilité, mais aussi de la transition écologique. Sur notre programme local de l’habitat, nous avons prévu un programme ambitieux de 1200 logements sociaux par an. 800 en locatif et 400 en accession sociale. Nous allons avoir une politique de réhabilitation des logements anciens et vacants.
Vous êtes également engagés contre le modèle pavillonnaire…
Le Pays Basque a vécu comme toutes les régions de France ce phénomène de l’étalement urbain. Ce modèle du pavillon. Le rêve de la maison individuelle. Nous en sortons actuellement, mais nous en avons les stigmates. Une grande partie du Pays Basque est jonchée de ces lotissements que l’on doit à des dessins réalisés non pas par des architectes, mais par des géomètres. Ils ont fait de la géométrie là où il aurait fallu mettre de l’humain. Nous devons faire le constat que ce Pays Basque a un modèle urbain. Historiquement, nous connaissons la densité. Tous les cœurs de village sont denses. Mais nous avons vécu un glissement sur lequel nous réfléchissions beaucoup. Nous allons y réfléchir dans le schéma de cohésion territoriale, nous allons faire notre contribution dans le SRADDET de la Région Aquitaine. Les villages de demain doivent beaucoup ressembler à ceux que le moyen-âge nous a légués.
À Bayonne, vous avez travaillé autour de l’attractivité des familles et des personnes âgées, quel travail a été mené ?
Il faut que les fonctions urbaines soient restituées. Nos villages perdent pour certains d’entre eux de la population. La solution n’est pas de créer des nouveaux lotissements. Nous devons réfléchir à des outils d’urbanisme qui nous permettent de réfléchir à cette fonction urbaine. Il faut des logements accessibles, mais aussi des commerces, des services et des médecins… Tout est important. Nous devons réfléchir à notre aménité urbaine. C’est vrai pour les villes, mais aussi pour les villages.