L’intercommunalité Vallée de l’Hérault a répondu aux enjeux de son plan local de santé en collaborant avec deux partenaires privés : un groupe immobilier et une mutuelle. Résultat : un lieu de 2600 m2 où des médecins spécialistes sont arrivés pour répondre aux attentes des habitants. La construction de ce pôle de santé, en partenariat, a permis de nombreuses économies. Joseph Brousset, le DGS de l’intercommunalité, a répondu à nos questions.
Nous vous proposons un pitch vidéo en introduction.
Par rapport à quelles problématiques de votre territoire avez-vous monté ce projet ?
La base de cette initiative, c’est notre projet de territoire. Nous nous sommes rendu compte que, comme beaucoup de territoires, il y avait un besoin de construire une médecine de ville. Nous avons tout de même 40 000 habitants. Nous devons les accompagner. Nous avons donc décidé de mettre en place un contrat local de santé, à l’échelle du Pays Cœur d’Hérault, signé avec l’État depuis une dizaine d’années.
La maison de santé était partie intégrante de ce projet ?
Oui, mais notre pôle de santé dépasse celles que l’on trouve actuellement et traditionnellement sur le territoire français. Elle est créée sur un triptyque partenarial. Il y a la communauté de communes, un opérateur, le groupe FDI, qui vient porter le projet immobilier et un opérateur de santé, le groupe Aésio. Nous avons travaillé avec ce dernier pour répondre aux enjeux identifiés lors du diagnostic de notre contrat local de santé.
Quels étaient ces enjeux ?
Dans notre diagnostic, plusieurs questions sont ressorties mais une de manière assez importante : la carence de médecine spécialisée sur le territoire. Nous avons donc mis au centre de la discussion avec Aésio cette question.
Comment s’est déroulée cette relation de partenariat ?
C’était inimaginable de dire que nous allions directement porter le projet de santé. Ce n’est pas comme ça que cela fonctionne. Nous avons souhaité ce triple partenariat pour que chacun apporte des éléments complémentaires, pour rendre le plus efficient possible notre projet. Nous avons décidé d’avoir un double rôle. Celui de porteur et d’accompagnateur du projet. Par exemple, quand il y a eu la construction du bâtiment, nous nous sommes mis d’accord pour que, dans le cadre de nos compétences, nous puissions jouer sur notre capacité à subventionner l’immobilier d’entreprises. C’est comme une entreprise qui s’installe, avec un opérateur qui dirige le projet. Cela veut dire que la collectivité ne s’engage pas qu’avec des mots. Elle accompagne le projet financièrement pour qu’il aboutisse.
Quel rôle a joué le groupe Aésio ?
C’est un rôle pivot. Il y a la médecine traditionnelle qui est déjà installée sur notre communauté et notamment dans la ville de Gignac. Autour de l’existant, Aésio est venu apporter le complément. Ils ont installé, en utilisant le plateau technique de la clinique de Montpellier, des médecins spécialistes. Ils accompagnent notre projet de santé. Cela renforce les discipliness médicales mises à la disposition des habitants. Ils permettront, pour la patientèle, d’avoir un suivi pré et post-opératoire. Cela réhabilite la médecine de ville.
Quel cahier des charges avez-vous donné ?
Il y avait un besoin de médecins spécialistes mais également de renforcer certains aspects d’accompagnement aux soins. Par exemple, Aésio apporte un nouvel espace d’imagerie médicale. Il sera à disposition sur le site. Il y aura également un groupe privé qui était ailleurs sur le territoire qui va apporter un laboratoire d’analyses médicales. Le bilan, c’est que nous retrouvons sur un même lieu des généralistes, des spécialistes, et de nombreux compléments. Nous ne sommes pas loin d’avoir sur 2600m2, un petit hôpital de proximité.
Le partenariat public-privé vous permet-il de limiter les coûts ?
Déjà nous limitons les coûts pour les patients car ils auront moins de déplacements sur Montpellier à effectuer. Ils pourront préparer les opérations et avoir un suivi sur place. Mais pour la collectivité, c’est effectivement aussi une diminution des coûts. Nous avons participé à l’achat puisque nous avons vendu les terrains à l’opérateur. En déduction, nous avons financé, à travers la compétence immobilier d’entreprise. Mais nous avons également réalisé toutes les infrastructures extérieures comme le parking de 150 places, les réseaux… Le groupe FDI qui a porté la partie immobilière du projet a déboursé 4,9 millions d’euros. Il y avait dans le projet 500 000 euros de foncier dont 200 000 euros d’apport de la communauté pour accompagner et subventionner l’achat. Pour les infrastructures extérieures, nous avons déboursé environ 1 million d’euros.
Quel est le montage financier au niveau de l’immobilier ?
La structure FDI fait deux choses. Elle a une partie de la structure qui est revendue à des médecins généralistes ou à des libéraux dans d’autres domaines. Nous allons avoir par exemple un centre anti-douleur. Il y aura aussi de la médecine chinoise. Une partie du bâti est vendue pour que l’opération s’équilibre et l’autre est louée au groupe Aésio pour installer son centre avec les médecins spécialistes et son plateau technique de la clinique Beausoleil.
Qu’est-ce qui a intéressé le groupe Aésio ?
C’est une logique gagnant-gagnant. Sur notre territoire, beaucoup d’habitants sont des patients de ce groupe mutualiste. Pour eux, c’est aussi une expérience qu’ils voulaient tenter. Accompagner une médecine de ville. C’est un dispositif qui est témoin d’une vraie évolution dans la manière de voir un projet de santé. Une collectivité peut aussi être très accompagnatrice dans le domaine de la santé…
Sans cet accompagnement, Aésio ne serait pas venu ?
Ils étaient intéressés mais sans l’apport et les actions de l’intercommunalité, je pense qu’ils ne seraient pas venus. C’est l’idée de la collectivité accompagnatrice. Les élus et notre président ont été proactifs. C’est ce qui fait la différence entre être intéressé par un projet et aller jusqu’au développement de celui-ci.
C’est vrai que dans les intercommunalités, on voit plutôt ce type d’aides dans l’accompagnement d’entreprises…
Paradoxalement, la santé est peut-être le secteur où les intercommunalités ont le moins de compétences. Malgré tout, la manière dont nous avons monté notre projet montre que c’est possible. Il y a peu de projets comme cela mais l’ensemble des participants, dont les habitants, vont s’y retrouver.
Quelles difficultés avez-vous pu rencontrer ?
Nous avons été dans des difficultés de coordination et de compréhension les uns des autres. Comment allions-nous porter le projet et comment allait-il s’inscrire dans une logique d’un contrat local de santé ? Il faut prendre en compte des enjeux qui dépassent la collectivité. Toutes ces questions ont demandé beaucoup de souplesse. Pour arriver à réaliser ce que nous souhaitions faire, il fallait qu’Aésio participe. Mais il fallait également un porteur de projet immobilier capable de s’adapter à nos demandes mais aussi à celles des médecins généralistes et autres paramédicaux qui devaient arriver sur le site. Nos deux partenaires ont su comprendre les enjeux.
Quels conseils pouvez-vous donner à d’autres intercommunalités ?
Le premier tient en trois mots. Passion. Passion. Passion. Mais derrière il y a l’idée que la collectivité doit comprendre qu’elle ne peut pas s’exclure de ce projet. Y compris financièrement. Même s’il faut le faire, il faut s’en donner les moyens même si un grand groupe vous accompagne. On ne peut uniquement faire jouer le rayonnement de l’intercommunalité. Nous devons être en lien et le garant des besoins des habitants. Tout le monde doit y gagner.
Interview filmée réalisée le 18 janvier 2022 dans le cadre de la journée annuelle d’Intercommunalités de France dédiée aux finances et à la fiscalité. Programme de retour d’expériences des intercommunalités en partenariat Intercommunalités de France et Territoires-audacieux.fr