Le Réseau Action Climat : un plaidoyer environnemental pour la transition territoriale

Souvent associé aux termes de lobby, le plaidoyer est méconnu à tort dans l’engagement climat. Pourtant, en consolidant le maillage territorial, il est le messager commun des différents acteurs de la transition. Cette semaine, découvrez le plaidoyer pour le climat dans un échange entre Caroline Panard de Futureproofed et Zoé Lavocat, Responsable Climat et Territoires au Réseau Action Climat.

Une formation donnée au Camp Climat en 2019 par le Réseau Action Climat pour former les citoyens aux enjeux des politiques locales.

Présentez-nous le Réseau Action Climat ?

Le Réseau Action Climat est une association qui fédère aujourd’hui 25 ONG nationales et 10 associations locales, telles que Greenpeace, le CLER, Alternatiba, etc. L’objectif est d’influencer les politiques publiques. Le plaidoyer a pour intention de transmettre du contenu et de favoriser la coordination pour encourager la prise de décision. Nous portons un message unique aux élu-e-s locaux, nationaux et internationaux, aux médias, et au grand public. Nous regroupons des profils très variés, faire du plaidoyer c’est maîtriser des domaines très différents : des profils chercheur, SciencesPo, militants… 

Quelle est votre définition de la transition ? L’adaptez-vous selon les publics auprès desquels vous intervenez ? 

Je dirais qu’il n’existe pas une transition mais des transitions. Il y a autant de transitions que de secteurs thermique, agricole, énergétique… Dans tous les cas, nous travaillons au RAC avec l’idée de trajectoire qui est un fil rouge. Cette trajectoire, celle de limiter le réchauffement à +1,5 degré, va se décliner pour chaque thématique de manière spécifique avec des axes communs : Comment éviter de générer des émissions en premier lieu ? Comment réduire notre consommation ? Comment augmenter notre production et notre efficacité énergétique ? Quelles sont les pratiques durables que l’on peut développer ? 

Le plaidoyer est un exercice assez méconnu. Comment identifiez-vous les sujets que vous allez traiter ?

En effet, il s’apparente souvent au terme de lobby qui a une connotation plutôt péjorative. Notre travail, c’est de donner aux acteurs politiques les outils et les informations nécessaires pour mettre en oeuvre des politiques de transition ambitieuses. 
Nous travaillons en trois étapes. D’abord, nous identifions l’objectif que l’on veut atteindre. Par exemple, avoir un nombre défini de collectivités qui mettent en place une Zone Faible Emission (ZFE). Nous déterminons également en interne les thématiques prioritaires, en accord avec l’ensemble des acteurs du Réseau : celles qui sont les plus structurantes en termes d’émissions comme le transport, par exemple. Nous saisissons ensuite l’opportunité qu’ouvrent des obligations légales ou des échéances dans le calendrier. Par exemple, récemment, le projet de loi Convention Citoyenne pour le Climat. Ce sont des temps forts qui parlent à tout le monde et qui permettent de renforcer notre argumentaire. Vient alors le moment de cibler les territoires pour le sujet choisi : est-ce que l’on choisit toutes les agglomérations ? Uniquement les métropoles ? Certaines métropoles ?

De manière générale, est-ce que vous privilégiez un certain type de territoire ou y en a-t-il certains qui sont plus demandeurs que d’autres ?

Mobilisation du groupe de travail à Marseille pour le développement des transports en commun.

Nous avons autant d’intérêt pour des petits territoires que pour des territoires plus connus, présenté comme “exemplaires”. Ces territoires prouvent par l’exemple que c’est possible, mais il y a tout autant d’intérêt pour les territoires moins “spectaculaires”, ceux qui parlent de zéro. Le succès des territoires “exemplaires” n’est pas entièrement réplicable, on peut avoir un partage d’expérience mais chaque territoire dispose de ses propres ingrédients. L’histoire des plus connus, comme Loos-en-Gohelle ou Grande-Synthe, est très importante pour cibler le grand public. Le changement climatique est assez anxiogène et ces récits emblématiques sont d’autant plus importants dans ce contexte pour montrer que la transition est possible.

Il est difficile de communiquer sur les enjeux du changement climatique, quelle posture adoptez-vous ?

Nous allons au-delà d’un travail de communication, nous sommes convaincus et optimistes quant au fait que l’on peut changer les choses. À titre individuel, je ne pourrais pas m’engager dans cette activité si je n’étais pas convaincue. La question de la communication est en effet difficile, c’est un dosage entre le côté réaliste de l’évolution des records de température chaque année qu’il faut tout à fait entendre, et la volonté de ne pas se laisser abattre. Les solutions, on les connaît depuis longtemps et elles peuvent être mises en oeuvre, particulièrement à l’échelle des territoires. Les élu-e-s veulent agir, ils ne savent simplement pas toujours comment et par où commencer.

Il y a une diversité des potentiels et des contextes historiques, économiques et sociaux des territoires que l’on ne peut pas comparer. Chaque territoire peut être moteur sur sa propre thématique. Il faut surtout bien comprendre d’où l’on part : dans des territoires historiquement moins engagés, une première approche de la transition ne sera peut-être pas exemplaire mais sera le témoin d’une grande progression. 

Quelles solutions proposez-vous à ces territoires qui souhaitent s’engager ? 

Nous n’intervenons pas directement dans les concertations autour des politiques publiques pour le moment, nous diffusons de manière locale via de la formation et des outils à destination de groupes locaux, de citoyens, d’associations. Nous faisons appel à trois leviers d’action. Via les citoyens, tout d’abord, à travers la formation et l’animation pour qu’ensuite ils et elles soient en capacité d’agir au niveau local et de travailler sur les politiques publiques. C’est ce que nous faisons avec la campagne Alternatives Territoriales qui accompagne une cinquantaine de groupes locaux pour qu’ils fassent du plaidoyer local en faveur du climat et de la justice sociale. Via le soutien aux collectivités ensuite dans la mise en oeuvre des politiques publiques : nous avons travaillé avec l’ADEME à un catalogue de propositions et de mesures, par exemple. Enfin, nous intervenons au niveau de l’État et de l’Union Européenne, principalement pour activer la question des financements, car nous estimons que le principal blocage à la mise en oeuvre de la transition vient surtout du manque de moyens.

Quels sont les projets phares du Réseau Action Climat ?

Une des réalisations dont je suis particulièrement fière est la campagne Alternatives Territoriales, lancée en 2017. Suite à la loi NOTRe, il y a eu cette vague de territoires qui devaient réaliser les PCAET : ces documents de planification représentaient une opportunité pour les citoyens de s’impliquer pour la transition de leurs territoires. Nous avons alors formé, accompagné et fait monter en compétences une cinquantaine de groupes locaux afin qu’ils soient en capacité d’être force de proposition, ou d’opposition si besoin, dans le cadre de la réalisation des plans climat. À Marseille, par exemple, le groupe local a créé un PCAET avec 350 propositions concrètes ! En 2020, nous avons principalement travaillé sur les municipales.

Les citoyens ont activement influencé les programmes afin que les engagements de la part des différent-e-s candidat-e-s soient suffisamment ambitieux. L’objectif désormais est de s’assurer qu’ils soient réalisés sur le terrain, que ce ne soit pas juste des promesses électorales, toujours dans une démarche de co-construction. Nous avons également publié deux analyses complètes sur l’utilisation des fonds européens par les Régions, avec pour objectif de  rendre publiques et intelligibles ces questions structurantes de financements européens pour la transition.

FutureproofedCities soutient 137 villes et communes de Belgique, des Pays-Bas et de France pour concrétiser les Plans Climat. Notre plateforme, complétée par notre équipe d’accompagnement, permet de suivre facilement les progrès d’une ville et de prévoir l’impact de ses actions sur le CO2 et les flux financiers. De plus, l’outil agit comme un réseau social qui met en relation ses utilisateurs à travers les villes et les régions. Dans sa partie communication, l’outil implique également les citoyens dans l’action climatique. Grâce à l’effort de ses utilisateurs, la communauté FutureproofedCities a investi 3,08 milliards d’euros, économisant annuellement 379 millions d’euros et 1,34 million de tonnes de CO2. Ils ont publié 351 mesures publiques et 726 actions, qui peuvent servir de source d’inspiration. Pour réaliser nos projets, Futureproofed compte 19 collaborateurs expérimentés et enthousiastes.