Lycée de La Brie à Monbazillac : un laboratoire précieux pour tester les innovations viticoles
Situé à Monbazillac, en Grand Bergeracois, le lycée de La Brie forme les étudiants aux techniques agricoles. En parallèle, la structure tient une exploitation viticole dont certaines parcelles sont vouées à l’expérimentation d’innovations viticoles.
Le directeur de l’exploitation, David Dauphin, nous embarque dans un tour des différentes expérimentations mises en œuvre sur le domaine de La Brie.
Tout débute par un chiffre. 37 hectares, soit la superficie de l’exploitation viticole du lycée de La Brie. Sur cette surface agricole, on décompte 26 ha de vignes cultivées en bio, le tout soumis à une charte de haute qualité environnementale (HVE3 niveau 4). Suivi par la chambre d’agriculture de la Dordogne et par la Fédération des vins de Bergerac et Duras, l’établissement mène des expérimentations au titre de la pédagogie (côté lycée) et en tant que terre d’essais pour nourrir les débats de la profession viticole.
L’exploitation de La Brie, terre pionnière pour l’agroforesterie
Depuis 2022, l’agroforesterie y est pratiquée. Aujourd’hui, près de 2 ha sont gérés via cette méthode agricole, à raison d’une ligne d’arbres plantée tous les huit rangs de vigne. “On trie les espèces d’arbre par ligne afin d’expérimenter les différents rendements selon les essences associées”, nous explique David Dauphin, directeur de l’exploitation viticole.
Les conclusions tirées de ces deux années d’expérimentation seront exposées en novembre 2024. Cela prendra place lors de la rencontre nationale des groupes Déphy, conglomérat d’exploitations viticoles françaises engagées en production dénuée de produits phytosanitaires.
Parmi les essences testées au lycée de La Brie, nous retrouvons de l’aulne glutineux, du tilleul ou encore du bouleau verruqueux. De quoi attirer la biodiversité dans les vignes. Le potentiel de floraison des arbres implémentés permet également de faciliter la transhumance des ruches d’abeilles.
L’exploitation reste tout de même tributaire des conditions naturelles. En témoigne la nouvelle plantation de noyers qui a tourné au vinaigre, d’après David Dauphin : “Entre l’hiver et le printemps très humides que nous avons eus en 2024, puis les interférences animales des chevreuils et des sangliers, la pousse de ces arbres a tourné à la catastrophe.”
La clé de la réussite de l’expérimentation, c’est la diversité. En plus des arbres, le lycée de La Brie a ajouté des espèces fruitières afin d’assurer la pollinisation des parcelles. “Le peuplement multi-espèces permet la résilience de la biodiversité. C’est bien plus viable que le mono-espèce”, assure David Dauphin.
Quelques questions subsistent quant au passage à la culture en agroforesterie. Pourquoi perdre l’espace d’un rang de vignes pour y planter des arbres ? Car “mettre des arbres directement dans les rangs de vignes nous ôte la possibilité d’y passer avec les engins mécaniques enjambeurs pour l’entretien”, répond le chef d’exploitation. Et pourquoi revenir 50 ans en arrière, époque où les vignerons étaient sommés d’arracher les arbres des exploitations pour maximiser le rendement viticole ? “Certains se demandent ce que nous faisons… Or, si nous, lycée agricole, n’expérimentons pas, alors qui le fera ?”
Un projet d’agrivoltaïsme parmi les innovations viticoles
Si l’agroforesterie renforce l’appétence des vignes à résister aux nuisibles habituels, le lycée de La Brie ne reste pas moins menacé par le dérèglement climatique. Tandis que des rangs sont déjà arrachés dans le Bordelais, le Bergeracois est – pour le moment – plutôt épargné, d’après David Dauphin.
Pourtant, la grêle guette. Elle qui peut ravager une parcelle en quelques minutes par la force avec laquelle elle s’abat sur les grappes de raisin. De quoi justifier le projet d’innovation porté par le domaine de La Brie : l’agrivoltaïsme.
L’idée ? Déployer des panneaux photovoltaïques mobiles au-dessus de 5 ha de vin Bergerac afin de les parer à la menace de la grêle, du gel mais aussi de la sécheresse. Bientôt mis en place, ce projet d’agrivoltaïsme est porté à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine au gré de la participation de plusieurs établissements d’études agricoles. Le lycée de La Brie a ainsi été désigné comme exploitation de référence pour l’expérimentation.
“Notre objectif sur ce projet est d’essuyer les plâtres pour la profession viticole, tout en essayant de produire du vin”, affirme David Dauphin. Les différentes innovations viticoles menées au sein de l’exploitation de La Brie sont ainsi suivies par le ministère de l’agriculture qui souhaite se nourrir des résultats pour parfaire sa politique à l’échelle nationale.
Valentin Nonorgue