Rénover l’ancien avec des techniques nouvelles : l’intérêt du biosourcé en Bergeracois
Réhabiliter plutôt que construire de zéro, limiter l’impact sur l’environnement des maisons vivantes, opter pour des matières renouvelables : telle est la vision de “l’architecture du futur” pour Alexandre Prout, architecte associé à l’agence Plus Architectes.
Actuellement basé à Bordeaux et en cours d’installation à Bergerac, le créateur nous explique l’intérêt des matériaux biosourcés, de plus en plus utilisés sur les chantiers. Il clame également son attrait pour le Bergeracois, territoire disposant de nombreuses vieilles bâtisses.
Quelles sont les actions menées par votre cabinet ? Sur quels territoires agissez-vous ?
Nous sommes architectes et architectes d’intérieur depuis 15 ans. On travaille sur des maisons vivantes, connectées et qui mettent en exergue les 5 sens. Nos maisons “voient” : elles captent le soleil, font entrer la nature. Elles “respirent” en se ventilant avec des matériaux naturels. Elles sont à l’écoute des occupants car elles sont réalisées sur mesure, en fonction des demandes de confort et de santé.
Nous sommes situés sur Bordeaux et travaillons sur un rayon de 2h autour. De Royan aux Landes en passant par le Lot-et-Garonne et la Dordogne.
Qu’est-ce qu’une maison vivante ?
La base de la maison vivante, c’est sa connexion à l’environnement. Nous organisons et ouvrons la maison vers l’extérieur pour donner l’impression de vivre en union avec la nature. Ensuite, nous travaillons sur la ventilation mécanique et sur les isolants afin que la maison puisse supprimer le trop d’humidité. Il y a donc une recherche savante pour adapter les techniques selon l’orientation (nord, sud, est, ouest) et selon les caractéristiques du bâtiment d’origine.
Autre solution technique, la pièce solaire est munie d’une fenêtre de 5 mètres. La chaleur qu’elle capte est redirigée sur les différentes parois de la pièce. Ce qui lui permet ainsi de chauffer toutes les pièces de la maison.
Le Bergeracois et ses bâtisses historiques
Vous installez actuellement une agence à Bergerac. Quel intérêt de s’installer ici ?
Notre intérêt est de plusieurs ordres. Nous avons plusieurs projets sur le Bergeracois donc il nous faut être plus près de ces chantiers. Ensuite, nous connaissons bien les conditions de réhabilitation de vieilles bâtisses à l’échelle locale. Troisième point, plus anecdotique, mon père est Périgourdin donc cela permet un rapprochement de mes racines familiales.
Pourquoi travaillez-vous principalement autour de la réhabilitation de vieilles bâtisses ?
Nous sommes attirés par ces maisons qui ont une histoire, par le bâti ancien. Pourquoi ? Car il y a une âme qui s’en dégage, nous n’avons pas envie de voir mourir des constructions historiques et emplies de savoir-faire. À l’époque, ces maisons étaient construites avec l’aide de tout le village. Et nous retrouvons aujourd’hui cette dynamique de chantier participatif avec des acteurs qui cadrent la mise en œuvre, portent un groupe de 10-15 personnes et transmettent les compétences nécessaires aux participants.
Vous réalisez un chantier spécial pour vous installer à Bergerac. Quelles sont ses spécificités ?
C’est un chantier intéressant car nous sommes au cœur d’une typologie qui nous porte. Nous réhabilitons une ancienne ferme, avec un ensemble d’atouts existants : une bonne orientation, un système de récupération d’eau de pluie, des moellons, des belles charpentes, etc. Nous reprenons cette base et faisons évoluer le chantier par l’utilisation de matériaux biosourcés.
Le biosourcé en Bergeracois : le naturel pose ses bases
Qu’est-ce que le biosourcé ?
Le biosourcé est un matériau issu d’une filière végétale, c’est une matière renouvelable. On y retrouve notamment le bois, le chanvre ou la paille. Il faut le différencier du matériau géo sourcé tel que la terre ou la pierre de taille. L’intérêt des matériaux biosourcés, c’est qu’ils respirent. Lorsque nous réhabilitons du bâti ancien, nous avons besoin d’y implanter des matériaux biosourcés. Cela permet par exemple le transfert d’humidité et assure un confort aux futurs occupants. Peu importe la météo extérieure au bâtiment.
Comment harmonisez-vous les ressources déjà présentes et les matières nouvelles ?
D’abord, le défi est d’optimiser le confort en respectant les valeurs de la base déjà présente. Il faut aussi pérenniser en apportant des matériaux nouveaux, avec de nouvelles techniques. Par exemple, nous concevons une pièce solaire qui servira de radiateur à l’ensemble de la bâtisse. Ensuite, nous travaillons avec des matériaux réutilisés pour avoir un résultat qui respecte le plus possible l’environnement. En détruisant des parties de la maison, nous allons recycler le moellon, la terre qui étaient déjà présents et qui ont des spécificités positives sur le plan thermique.
Rénovation et biosourcé en Bergeracois : un challenge innovant
Quel challenge représente le fait de rénover en implémentant des matériaux biosourcés ?
Comme nous ne sommes pas dans une filière classique, nous n’allons pas récupérer des matériaux traditionnels chez un fournisseur. Nous sommes quasiment à contre-courant de ce qui se fait normalement. Les défis sont nombreux : se procurer les matériaux à des prix abordables, travailler avec des entreprises qualifiées pour l’utilisation des matériaux biosourcés et les conditions qu’ils imposent. Pour respecter le bâti ancien, nous avons donc à reprendre certains matériaux anciens qui étaient déjà intéressants (moellon, terre…) tout en apportant les atouts de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux.
Quels besoins rencontrez-vous vis-à-vis de votre activité sur le Bergeracois ?
Il va falloir nous connecter avec des entreprises du secteur bergeracois. Créer un réseau qui est capable de s’adapter à notre philosophie, à notre manière de construire. Car il y a des bâtisses, il y a de la demande. L’idée est ensuite de trouver des acteurs locaux pour concrétiser nos projets sur le territoire.
Propos recueillis en octobre 2024, par Valentin Nonorgue.